La Sociologie de la Constitution congolaise du 18 février 2006
Par
Felicien KALALA MUPINGANI
Professeur de droit public à l’Université de Kinshasa, Secrétaire chargé de l’enseignement du Département de Droit public interne, Rapporteur adjoint de l’Association congolaise de Droit constitutionn

Introduction

18 ans depuis le 18 février 2006 qui a vu la République démocratique du Congo  s’engager sur la voie de la démocratie, l’instrumentalisation de la constitution reste la plus importante des défis à relever dans la mesure où le non-respect des règles du jeu démocratique constitue la marque commune de la plupart des régimes politiques africains en général et congolais en particulier.

En effet, au moment où les questions constitutionnelles semblent être le repas délicieux de tous les congolais, les organisateurs d’une journée scientifique à l’université de Kinshasa  nous invitent de réfléchir sur un thème aussi provocateur intitulé : l’ordre constitutionnel face aux mutations de la société : du populisme au discours académique.  

Sur le plan épistémologique, ce thème mérite une reformulation avant de situer le sens de notre propos. En effet, accepter le mot « face » entre l’ordre constitutionnel et les mutations de la société laisserait croire qu’il y aurait une certaine incompatibilité entre ces deux groupes de mots. Comme nous le savons ou devrions le savoir : «  Tout ordre constitutionnel est à l’origine un ordre social ». C’est pourquoi nous aurions voulu que le thème soit reformulé : « l’ordre constitutionnel et mutations de la société : du populisme au discours scientifique et non académique ». 

Pour soutenir scientifiquement notre propos, nous avons centré  notre communication autour du sujet : «  La sociologie de la constitution congolaise du 18 février 2006 ». 

La sociologie ne saurait être considérée comme un intrus dans un débat scientifique sur la constitution dans la mesure où toute action humaine, y compris dans le domaine du droit, tombe dans le domaine de la sociologie . La constitution constitue une matière tellement importante qu’elle ne peut être abandonnée aux seuls juristes .

En effet, toute étude fertile du droit constitutionnel ou de la constitution fait appel à une approche sociologique . Selon Léon Duguit, le droit constitutionnel est une partie de la sociologie, dans laquelle on cherche à déterminer les lois qui régissent les phénomènes relatifs  à la formation, au développement et au fonctionnement de l’Etat, considéré comme centre nerveux cérébro-spinal de l’organisme social. Il fait par cette affirmation, une lecture systémique et cybernétique du droit constitutionnel en lui donnant pour objectif : « d’observer et de constater des faits, essayer ensuite de déterminer des lois, c’est-à-dire les rapports fixes qui unissent ces faits dans leur ordre de succession et dans leur ordre de coexistence ; tenter enfin de prévoir, à l’aide de ces lois, les faits avenir. De ce point de vue, l’approche scientifique du Droit constitutionnel établit une similitude entre l’ordre social et l’ordre constitutionnel.       

Dans le  même ordre d’idée, nous affirmons avec Jacques Chevallier que : «  les phénomènes constitutionnels ne sauraient être analysés indépendamment de leurs  substrat social et politique ». 

La sociologie de la Constitution en RDC doit nécessairement se faire dans une perspective connectée, intégrant en particulier la trajectoire et la sociologie de l’Etat en occident. En effet, il est reproché à la Constitution congolaise du 18 février 2006 d’être « un produit d’importation, une pâle copie des constitutions occidentales  « Française », un corps étranger, une greffe qui n’a pas pris les réalités congolaises. Le Congo aurait importé l’ordre constitutionnel occidental et l’aurait juxtaposé à son ordre social, généralement au corps défendant de ses forces vives.

Cependant, si les constitutions modernes sont des produits d’une histoire européenne qui se sont progressivement imposés dans la quasi-totalité du globe, donc en RDC, cette « universalisation » soulève plusieurs enjeux. D’abord, ces inventions européennes ne surviennent pas ex nihilo, leur importation en Afrique et au Congo ne signifie pas que l’Afrique et le Congo n’avait pas inventé leurs propres modèles d’organisation politique et leurs propres modes de gestion du pouvoir et des principes qui les sous-tendent.

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