Cadre juridique des substances minérales trouvées occasionnellement en droit minier de la RDC

Au nombre des principales innovations apportées par la Loi n°18/001 du 9mars 2018 modifiant et complétant la Loi n°007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier, Grégoire BAKANDEJA wa MPUNGU mentionne dans son ouvrage intitulé droit minier et des hydrocarbures en Afrique centrale, la détermination du cadre juridique des substances minérales trouvées occasionnellement.

Cette nouvelle disposition est organisée à l'article 285 nonies du Code Minier qui dispose : "Toute personne physique de nationalité congolaise qui trouve occasionnellement une substance minérale précieuse, dont le commerce est réglementé, est autorisée de la vendre auprès d'un négociant ou d'un comptoir agréé moyennant paiement d'une taxe appropriée fixée par le ministre, pour autant que l'origine ne soit pas illicite."

Ainsi, une substance minérale précieuse trouvée par hasard mieux accidentellement peut être librement vendue par toute personne physique de nationalité congolaise qui la détient, auprès d’un négociant ou d’un comptoir agréé. Cependant, il faut d’abord que le commerce de cette substance soit réglementé, ensuite que cette personne s’acquitte du paiement d’une taxe appropriée et enfin que l’origine de cette substance ne soit pas illicite. Il faut aussi que la personne qui a trouvé cette substance soit de nationalité congolaise.  

C’est dans cette optique que l'article 527 quater du Règlement Minier spécifique que ce détenteur doit payer une taxe dont le taux est fixé par arrêté interministériel des ministres des mines et des finances. Selon l'arrêté interministériel n°0340/CAB.MIN/MINES/2022 et n°054/CAB/MIN/FIBANCES/2022 du 02 août 2022 portant fixation des taux des droits, taxes et redevances à percevoir à l'initiative du ministère des mines, le détenteur paie au trésor 5% de la valeur commerciale brute de la substance minérale précieuse trouvée occasionnellement.

L'insertion de cette nouvelle disposition est le fruit du lobbying des députés issues des provinces de production du diamant qui espéraient ainsi régler le sort des nombreuses personnes qui détiennent le diamant parce que trouvé de manière fortuite sur le chemin des champs ou ailleurs.

Cette disposition pose, selon Gary SAKATA M. TAWAB, un réel problème de cohérence avec l'ensemble du texte en ce sens qu'elle entre en contradiction avec les articles 5, alinéa 3 et 108 sexies, du Code qui déterminent les catégories de personnes susceptibles de détenir et commercialiser un produit d'un titre.

Conformément à l'alinéa 3 de l'article 5 du code minier qui dispose : « Sont autorisés à commercialiser les substances minérales :

a. les titulaires de droits miniers et /ou de carrières d'exploitation,

b. les entités de traitement,

c. les comptoirs agréés,

d. les coopératives minières agréées,

e. les négociants. »

De même, aux termes de l'article 108 sexies:

« sans préjudice des dispositions de l'article 5 alinéa 3 du présent Code, les établissements de crédit régulièrement installés sur le territoire national, le trésor public, l'administration des mines et certaines universités et institutions de recherches sont autorisés à détenir les produits miniers.

La détention des produits miniers par des bijoutiers, joailliers, artistes et dentistes est subordonnée à l'autorisation délivrée par le Gouverneur de province. »

Il ressort de l'analyse de ces deux dispositions que le législateur énumère les opérateurs et les acteurs du secteur pouvant détenir les produits miniers sans utiliser la formule legistique "sous réserve". Aussi, faut-il souligner qu'à la lumière de ces deux dispositions, chaque catégorie est astreinte à l'obtention préalable d'une autorisation ou d'un titre.

Contrairement à la version de 2002 du Code minier, celle de 2018 rend la personne physique inéligible aux droits miniers et/ou de carrières. Cela ressort de la nouvelle formulation de l’article 23 qui dispose :

« sans préjudice des dispositions de l’article 27 ci-dessous, sont éligibles aux droits miniers et de carrières :

a. toute personne morale de droit congolais qui a son siège social et administratif sur le territoire national et dont l’objet social porte exclusivement sur les activités minières;

b. toute personne morale de droit étranger dont l’objet social porte exclusivement sur les activités minières qui se conforme aux lois de la Républiques ;

c. tout organisme à vocation scientifique.

Les personnes éligibles visées au litera b du présent article sont tenues d’élire domicile auprès d’un mandateur en mines et carrières établi dans le territoire national et d’agir par son intermédiaire.

Les personnes morales de droit étranger et les organismes à vocation scientifique citées au litera b et c du présent article ne sont éligibles qu’aux droits miniers et/ou de carrières de recherches. »

Cet état des choses serait, selon Cim’s MULUNGULUNGU, une des causes de l’exploitation anarchique et clandestine de l’artisanat. En réalité cette réforme introduite par la Loi 18/001 a conduit la plupart des personnes physiques à se tourner vers l’exploitation artisanale, du fait qu’elles ne peuvent devenir titulaire des droits miniers ou des carrières. Le secteur minier artisanal connait, à ce jour, un engouement d’artisanaux, jamais connu auparavant.

Bien que la formulation de l'article 258 nonies est peu heureuse, sa consécration constitue néanmoins une atténuation des principes édictés par le code en ce qui concerne la commercialisation des substances minérales, il faut cependant reconnaître que sa mise en œuvre à tort, risque de constituer une menace quant aux efforts visant la traçabilité des produits miniers.

Notons enfin que malgré les incohérences présentées ci-haut, cette disposition traduit une réalité évidente au regard de la particularité de notre pays. Il serait beaucoup plus souhaitable d'encadrer sa mise en œuvre et de mettre en harmonie cette option avec les autres dispositions sus évoquées.


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